Objet d’art : du trône de Dagobert au lit de camp de Napoléon, les meubles en métal

Par Bertrand Galimard Flavigny

Le mobilier métallique a toujours existé et a produit quelques chefs d’oeuvre. Dans cette rubrique consacrée aux objets d’art, Bertrand Galimard Flavigny nous fait survoler l’ouvrage d’Alain Renner Mobilier de métal : de l’Ancien Régime à la Restauration et nous apprend à distinguer les différentes sortes de meubles de métal et autre mobilier volant, tout entourées de mystère !

Émission proposée par : Bertrand Galimard Flavigny
Référence : carr584
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Tous les manuels d’histoire, relayés par la chanson, ont évoqué le trône du roi Dagobert (604-639) dont on ignore s’il s’y asseyait à l’envers. L’évêque saint Remy remit de toute manière son souverain dans le bon chemin. Ce fauteuil, provenant du trésor de Saint-Denis et conservé à la Bibliothèque nationale de France, est en bronze en partie doré et pliant. Il date du VIe ou VIIe siècle, ce qui est logique compte tenu de son attribution. Nous connaissons par ailleurs des fauteuils en métal de l’époque médiévale et plus près de nous, des meubles en tôle laquée, comme cette commode estampillée de G.H. Lutz, ébénisterie de Pierre Macret dont la laque est attribuée à Samousseau (fin Louis XV). Cette pièce est reproduite dans l’ouvrage d’Alain Renner, Mobilier de métal de l’Ancien Régime à la Restauration.

C’est la première fois, à notre connaissance, qu’une telle étude a été réalisée. Seules des études ponctuelles sur tel meuble ou tel autre sans permettre de d’effectuer une synthèse cohérente. Il est vrai que le mobilier métallique procède d’une fabrication particulière et répond à une création particulière. Alain Renner, commissaire-priseur chez Sotheby’s et expert en meubles, rappelle que « deux corporations ont favorisé l’essor du meuble de métal, celle des ornemanistes et celle des marchands-merciers ». Ces deux-là ont joué un rôle particulier dans son élaboration et son développement au XVIIIe siècle, période marquée par une évolution rapide des styles décoratifs. Cela évoqué, les hommes n’ont pas attendu le XVIIIe pour façonner des meubles en métal, puisque l’on en connaît en Égypte en Grèce et chez les Romains. Il est vrai que ceux-là sont cités car ils étaient ornés de pièces en bronze. La période médiévale a eu, en revanche, une profusion d’ouvrages en fer, réalisés principalement en raison de leur solidité, précise Alain Renner pour assurer leur pérennité, car à l’époque on se déplaçait beaucoup. Cela nous fait songer au lit de camp en acier de Napoléon dont la partie supérieure en baldaquin est démontable. Ce petit modèle, dit « Second lit de Napoléon à Saint-Hélène » est orné sur un pied de la couronne impériale.

Nous pourrions distinguer deux sortes de meubles en métal. Ceux qui, comme les créations de André-Charles Boulle à la fin du XVII° siècle, voient leur armature en bois incrustée, notamment, de cuivre et de bronze doré et les autres, entièrement métalliques, en tôle laquée par exemple. Dans la première catégorie, apparaissent des « cas rarissimes » selon le mot de l’auteur. Au lieu du bronze doré, les artisans ont utilisé l’argent ou le bronze argenté. C’est le cas de la commode et de deux encoignures que Criaerd livra en 1742 à la comtesse de Mailly (1710-1751) pour le château de Choisy : les cartouches, les sabots, les chutes, les entrées des serrures et les poignées sont en bronze argenté sur un superbe fond vert Martin bleu et blanc à décor d’oiseaux (au Louvre). Alain Renner décrit par ailleurs une table en métal en vernis Martin à décor d’angelots par René Dubois vers 1770. La technique de la tôle vernie est apparue en Italie dès 1700. Ce serait un jésuite du nom de Buoanni qui aurait découvert le moyen de couvrir et de cuire les pièces qu’il vernissait. Introduite en France en 1763, elle concurrença immédiatement la laque, matériau fragile. C’est à partir de cette période que de nombreux objets furent réalisés de cette manière. Nous sommes toujours séduits par les sceaux à verre, les flambeaux et autres guéridons. Par ailleurs, au XVIIIe siècle, toute une série de petits meubles, appelés parfois « mobilier volant » comme les sièges, les escaliers de bibliothèque, les guéridons, les gaines d’horloge ou encore les brûle-parfums furent fabriqués en métal. Les fauteuils pliants d’aujourd’hui n’ont rien à envier au fauteuil pliable en acier poli daté du début du XIXe siècle ; les « transatlantique » au siège d’officier, de la fin du XVIIIe, en acier et laiton doré, pliant et démontable pouvant faire office de lit de repos.

Après être passé devant le mobilier religieux, nous nous arrêtons au chapitre consacré aux meubles à transformation ou meubles mécaniques. On en vit apparaître dès la période médiévale. Les meubles à transformation et à secret acquirent toutefois leurs lettres de noblesse au XVIIIe siècle. On appréciait particulièrement, à l’époque les mécaniques compliquées. Riesener, l’ébéniste et Merklein le mécanicien, surent s’allier afin de produire des bureaux mécaniques, par exemple. D’autres artisans conçurent des fauteuils susceptibles de se transformer en lit de repos. L’ouvrage reproduit une planche de Benjamin Geslin illustrant le fonctionnement d’un fauteuil et les diverses positions d’assise. Alain Renner considère que le mobilier de métal est entouré de mystère, il est désormais en partie dévoilé.

Texte de Bertrand Galimard Flavigny.

L'ouvrage "Mobilier de Métal" d'Alain Renner est publié aux Editions Monelle Hayot.

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